Le non savoir comme source de réenchantement

Dans mon travail, notamment en maïeusthésie, je m’appuie sur le « non savoir ». C’est la personne que j’accompagne qui me guide. Moi je la suis, en étant libre – autant que possible – de mes préjugés, attentes, croyances.

Le fait d’approcher le vivant avec cette innocence permet que tout ce qui émerge puisse être accueilli tel que c’est. Soit bienvenue. Il n’y a pas d’attente que quelque chose de différent que ce qui est là se présente. Quelle liberté ! Quelle légèreté ! Et surtout, quel espace ça laisse à l’émerveillement !

Quand j’étais enfant, je me demandais pourquoi les adultes avaient l’air de vivre dans un monde désenchanté. Il y a douze ans, pendant ma thèse de biologie-écologie, dans une période où je trouvais qu’on s’ennuyait ferme dans un laboratoire de recherche, j’ai lu un livre intitulé « Letters to Vanessa: On Love, Science, and Awareness in an Enchanted World » (Lettres à Vanessa : sur l’amour, la science et la conscience dans un monde enchanté).

L’auteur, Jeremy W. Hayward, physicien, explique à sa fille comment notre vision scientifique matérialiste du monde nous a conduit à le désenchanter, et comment nous pouvons changer de regard pour le réenchanter. Il ne s’agit pas de ne plus faire de science, mais de ne pas limiter notre vision du monde et de la vie à ce que nous en dit la science.

Cela rejoignait mes réflexions de l’époque qui m’ont conduit à quitter la recherche scientifique afin d’embrasser le monde autrement qu’avec de la matière grise : avec sensorialité, sensibilité. Poésie.

Je crois que ce qui fait passer un être humain de l’enchantement premier du petit enfant vers le désenchantement, tient essentiellement en deux choses :

  • les violences subies (physiques, psychologiques, verbales…), particulièrement quand nous les vivons dans la solitude, sans reconnaissance ni compassion,

  • l’assimilation d’innombrables croyances à propos de tout (ce qu’est un arbre, un corps, une étoile…)

Ces croyances viennent superposer des filtres à la réalité. Cela nous permet de mieux l’appréhender intellectuellement d’un certain côté, mais cela nous empêche aussi d’accéder à une vision vraie et entière de la complexité de ce qui est.

Nous nous retrouvons coupés du réel par ces filtres qui s’interposent en permanence entre notre regard et ce qui nous entoure. Croyant connaître ce que j’observe, je ne laisse pas d’espace pour être touché·e par son essence, par sa beauté, par sa vérité. Je vais lui coller une étiquette et cela va me rassurer, me donner un sentiment de contrôle. « Ceci » rentre dans « cette case ». Et du même coup, ce monde chatoyant devient gris, ou noir et blanc.

Mais quid de la rencontre ? Quid de l’émerveillement ? Cet émerveillement avec lequel je suis en contact, quand je m’ouvre à quelque chose qui me dépasse, à la vie dans sa stupéfiante diversité et intelligence ?

Je ne rejette pas en bloc le savoir. Je crois qu’il est important d’avoir des connaissances, de développer des croyances qui nous aident à nous repérer. Simplement, il me semble que nous gagnerions énormément à ne pas oublier d’en sortir fréquemment.

A quitter notre sérieux et nos sourcils froncés, pour retrouver notre âme d’enfant. A lâcher nos idées préconçues pour nous ouvrir avec curiosité à ce qui est. Pour aller nous rencontrer nous-mêmes, dans notre authenticité. Pour aller rencontrer les autres : notre partenaire, nos proches, de nouvelles personnes et cultures. Avec cette confiance qu’il y a quelque chose de beau en tout, qui n’attend qu’un regard aimant pour se montrer. Je vous invite à essayer.

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s